Ces microbes qui nous gouvernent

Alain Lenoir mis à jour le 15-Nov-2016

Réalisateur : Stéphane Bégoin
Auteurs : Vincent Gaullier, Cécile Dumas
Producteurs : GRAND ANGLE PRODUCTION, ARTE France (2016)

Film très intéressant sur un sujet en pleine actualité et une révolution en perspective : le rôle des bactéries dans la vie. Tout individu (animal, plante) est en fait un véritable écosystème et il comprend toute une série d'organismes symbiotiques comme des bactéries et l'évolution agit sur cet ensemble.

Les principaux exemples montrés dans le film :
- L'homme bien sûr avec ses deux kilos de microbiote (flore intestinale), qui hérite ses bactéries de sa mère à la naissance. Le microbiote est impliqué dans l'obésité et le diabète. Il existerait 3 microbiotes de base chez les humains indépendamment de leurs génotypes ou de l'alimentation. Les greffes fécales sont promises à un développement extraordinaire.
- Le puceron du pois (Acyrthosiphon pisum) possède dans son appareil digestif des cellules spécialiées appelées bactériocytes contenant des bactéries Buchneria aphidicola qui permettent au puceron de digérer la sève. Après un traitement antibiotique, le puceron est incapable de se développer normalement.
Hors film : On trouve aussi de telles bactéries dans l'estomac de certaines fourmis Camponotus (voir Bactéries ef fourmis).
- au Kénya la hyène tachetée qui vit en meutes marque son territoire et son identité avec des secrétions des glandes anales, secrétions émises par les bactéries. Au contraire, la hyène rayée qui vit en solitaire a des bactéries différentes et moins nombreuses. Une vie sociale intense semble liée à un microbiote plus riche.
- Les bactéries Wolbachia sont présentes chez plus de 60% des insectes et sont qualifiées de "manipulatrices de reproduction" ou de "star des bactéries". En effet chez des petites guêpes Trichogramma, elle permettent la parthénogénèse thélytoque où les femelles se reproduisent en l'absence de mâles. Elles n'émettent plus le signal d'appel sexuel alors que les femelles sans bactéries émettent leur signal et s'accouplent normalement.
- Il existe des seiches bioluminescentes qui ont des bactéries qui émettent une substance qui s'illumine spontanément à partir d'une certaine densité.
- à l'Institut Pasteur à Paris on élève des souris en milieu aseptique depuis leur naissance (donc sans microbiote), elles sont beucoup moins anxieuses que des souris normales.
- Au Japon il y a une punaise qui pond ses oeufs dans une gelée qu'elle secrète et qui contient des bactéries. La jeune punaise mange cette gelée et intègre alors les bactéries.
- Il existe un ver marin sans tube digestif mais avec des bactéries à sa surface qui intègrent du souffre et du carbone pour le nourrir. Ce vers peut ainsi vivre dans des milieux très pollués.

Voir la critique de Télérama

La présentation d'Arte :
"Comment les bactéries, indispensables à la bonne santé de nos organismes, pourraient se révéler les moteurs de l'évolution. Une révolution scientifique ?
Si c'est bien aux microbes que l'on doit les innombrables morts de la peste, de la typhoïde ou de la tuberculose, seuls 1 % de ceux que l'on connaît sont facteurs de maladies. En revanche, des plantes à l’homme, il n’existe aucun être vivant qui ne soit peuplé de bactéries indispensables à son existence. Ce n'est que depuis une dizaine d'années que la science commence à lever le voile sur la complexité de leur rôle. Chez l’homme, on compte ainsi dix fois plus de microbes que de cellules. Sans ces micro-organismes, nous n'aurions pas notre placenta de mammifère, pas non plus notre cerveau de primate. Notre alimentation, notre système immunitaire et même notre système de reproduction ne pourraient pas fonctionner. Et grâce aux microbes, la seiche naine de Hawaii peut allumer ses photophores et se défendre contre ses prédateurs ; le ver marin de l'île d'Elbe se nourrir sans avoir besoin de système digestif ; et des micro-guêpes se reproduire sans mâle. Selon certaines hypothèses, les bactéries pourraient même constituer les moteurs de l’évolution…
Peuple intérieur
Jusqu’où ce peuple intérieur nous gouverne-t-il ? De Nashville à Tokyo en passant par Paris et Amsterdam, cette passionnante enquête scientifique part à la rencontre des nombreux chercheurs qui, à travers le monde, étudient l'importance des bactéries pour le règne du vivant. De plus en plus, leurs découvertes s'accélèrent et convergent en un scénario cohérent, révélant des aspects insoupçonnés de la nature et de son évolution. Ces hypothèses, qui font des bactéries la raison première de l’évolution du vivant et de la séparation des espèces, bouleversent la vision linéaire que nous en avions jusqu'ici. Une possible révolution scientifique."